Sociographie de la bourgeoisie
Suzanne de Brunhoff, Isabelle Garo, Claude Serfati, Anne-Catherine Wagner, Pierre-Paul Zalio, Bourgeoisie : état d’une classe dominante, Paris : Syllepse, 2001, 126 p.
Salariat : effacement ou reproduction des frontières de classe.
Dans le rapport de force entre capital et travail c'est le capital qu'il a emporté depuis les années 80. Idéologie de l'effacement des barrières de classe par l'actionnariat populaire : idéologie qui fonctionne car invisibilisation des classes populaires.
Les classes sociales existent
Actionnariat, les fonds de pension me font qu'accentuer la dépendance des salariés de l'entreprise ; ils ne les font pas grimper dans l'échelle des revenus.
Pour une maîtrise accrue de leurs dépenses, les entreprises ont fait refluer la part du salaire socialisé au profit du salaire fixe.
La donne est modifiée avec l'essor des fonds de pension : 30 % du total des actifs de la finance aux USA. Comme en France l'épargne salariale est faible (4-5 % du total détenu par les ouvriers et employés), la solution envisagée est le développement des fonds de pension (retraite par capitalisation). Pour cela remettre en cause les cotisations sociales (celle de la sécurité sociale) qui grève les finances de l'entreprise : reporter sur l'épargne individuelle le financement de la retraite. Le couplage entre une répartition (attribuant une pension minimum) et la capitalisation est préconisée par la banque mondiale.
Dans le cas de l'épargne financière, les salariés sont juridiquement propriétaires de leur compte mais leur usage revient au capital financier (USA).
Le différentiel de revenus entre dirigeants et ouvriers a augmenté : 42 à 350 entre 80 et 98. Le niveau des retraites dépend :
dans la répartition, des actifs et de leur contribution, Donc de leur nombre, et de leur salaire.
dans la capitalisation : de la bourse (le risque est donc reporté sur le salarié).
En France il y a une attente des institutions financières à la gestion de cette épargne salariale potentielle : institutions très concentrées, une dizaine seulement. Il s'agit de remettre en cause une norme (60 ans) pour y substituer la retraite à la carte : individualisation, à chacun selon ses moyens et ses fins.
Cette épargne me donnera aucun droit supplémentaire aux salariés sur la vie de l'entreprise : on le voit déjà, les décisions de fusion, achat, délocalisation, licenciement restent l'apanage des capitalistes.
Il n'existe pas de travailleurs rentiers. Par contre l'idéologie de la participation à la propriété privée du capital est importante, il s'inscrit dans un processus d'affaiblissement des oppositions de classe.
La bourgeoisie française sous le regard des sociologues
Concentration du patrimoine : 5 % des ménages détiennent 40 % du patrimoine.
Une population difficile à investiguer : mais nouveaux climats autour de l'entreprise a rendu possible de nouvelles enquêtes (plus réceptifs, moins secrets). Population à la culture spécifique.
Si ses positions sont multiples, la bourgeoisie tient néanmoins son unité dans sa relation aux affaires, et sa culture entrepreneuriale.
Culture propre, trois aspects :
Attention portée aux détails et nuances ;
Contrôle de soi ;
ritualisation des pratiques quotidiennes (art de la table, art de recevoir,...).
Le contrôle parental s'exerce plus longtemps et plus systématiquement qu'ailleurs. La sociabilité y est intense, la recherche systématique de l'entre soi, le « je » peu employé.
De nouveaux et anciens bourgeois : patrimoine familial, culturel, de jouissance. Les nouveaux ayant du patrimoine professionnel, Ils dérangent à cause de leur ostentation, de la rapidité de leurs biens, de la violence qui est au principe de l'accumulation initiale.
D'autres catégories d’appréhension que le commun : l'international.
En définitive la spécificité de la culture bourgeoise est de valoriser à la fois la continuité sans laquelle il n'y a pas de culture et de légitimité, et la mobilité qui est au principe de la réussite essentielle, de base, de la bourgeoisie. De ce point de vue elle doit sans cesse composer avec les nouveaux entrants.
La bourgeoisie mondiale pour un capitalisme mondialisé ?
Émergence d'un nouveau rapport de production qualifiée de capitalo-cadrisme par Lévy et Dumesnil et prenant en compte la croissance des fonctions de cadres (i.e faisant fonctionner le capital), qui en retour touche une part revalorisée de la rentabilité du capital, les stock-options, au point d'ailleurs que les actionnaires se voient dépossédés d'une partie de la plus-value.
Les fusions-acquisitions augmentent et sont le signe d'une concentration accrue : « la concurrence croisant en permanence la collusion. »
Les comportements des capitalistes tend à s'uniformiser et donc vont dans le sens de l'émergence d'une classe transnationale : perspective orientée vers l'extérieur plutôt que l'intérieur, même mode de formation, même consommation ostentatoire, etc. Mais cela reste embryonnaire.
Dans cet espace, le capital financier domine et demeure très concentré : entre 89 et 97, 86 % de gains boursiers vont à 10 % des salariés...
Le tout sous hégémonie américaine. Les USA garantissant, via leur puissance militaire, une sécurité à la valorisation du capital, sont un espace reconnu et couru par les capitalistes. Donc le capital s'abrite sous l’État, cela plus que jamais.
Mais les USA ne sont pas seuls : il faut parler de « Bloc transatlantique » (L'Europe + Japon + Australie + Nouvelle-Zélande).
Pour comprendre l'importance des États, voir leur rôle :
comme le capitalisme est un marché libre (le travailleur libre), la coercition ne s'autonomise que dans les institutions étatiques.
les institutions cristallisent les rapports de force entre classes et fractions de classe.
Dans le procès de mise en valeur du capital, les capitalistes doivent être assurés de la reproduction des rapports sociaux. Cela n'est possible qu'à la condition que le capital s'inscrive dans des territoires délimités : les États-nations. Leur contrôle est donc crucial.
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