Réflexions sur l'écriture

 


Annie Ernaux, L'Écriture comme un couteau. Entretien avec Frédéric-Yves Jeannet, Folio, 2011 (2003), 149 p.


A propos des livres auto-socio-biographiques (socio-analyse, généalogie personnelle, autobiographie...).

Le style adopté est celui d'une écriture clinique, que certains nomment blanche ou d'autres plate.

Tout ce qui est né est né de la douleur. « Une douleur sans nom mélange de culpabilité, d'incompréhension et de révolte (pourquoi mon père ne lit-il pas, pourquoi a-t-il des manières frustres). Douleur dont on a honte, qu'on ne peut ni avouer ni expliquer à personne. » (32)

Écrire quand on vient du monde populaire c'est écrire dans la langue de l'ennemi (Genet). Avec le sentiment d'être entré dans ce monde par effraction. « La seule écriture que je sentais juste était celle d'une distance objectivante, sans affect exprimé, sans aucune complicité avec le lecteur cultivé. » (34)

« Tout l'enjeu consiste à trouver les mots et les phrases les plus justes, qui feront exister les choses, « voir », en oubliant les mots, à être dans ce que je sens être une écriture du réel. » (35)

Une méthode fondée essentiellement sur la mémoire laquelle est alimentée constamment par des éléments en écrivant : choses vues, entendues (phrases souvent isolées, fulgurantes), des gestes, des scènes. « Je ne peux pas écrire sans voir ni entendre, mais pour moi c'est revoir et réentendre. » (40) « Il me faut la sensation (ou le souvenir de la sensation), il me faut ce moment où la sensation arrive, dépourvu de tout, nue. Seulement après, trouver les mots. Cela veut dire que la sensation est critères d'écriture, critère de vérité. » (40)

« Bourdieu évoque quelque part l'excès de mémoire du stigmatisé, une mémoire indélébile. » (64)

Après la parution des « Armoires vides », réflexion sur l'écriture. Lecture d'autres écrivains pour réussir à se situer. Notamment l'œuvre de Céline.

Frédéric-Yves Jeannet qualifie son écriture « d'écriture au couteau, minérale, sans épanchement ni métaphore » (81)

Parler d'écriture féminine c'est sous-entendre ipso facto une littérature de femmes pour les femmes. Il y aurait d'un côté la collection Arlequin et de l'autre côté la collection SAS. Ainsi il y aurait une gêne des hommes à lire Annie Ernaux. Bon nombre de romans masculins véhiculent sur les femmes une tranquille affirmation du pouvoir et de la liberté des hommes c'est-à-dire de leur attitude à dire et eux seuls l'universel (cf Michel Houellebecq par exemple en est un représentant). Certaines de ses lectrice se disent gênées par l'impudeur ou l'absence d'émotion de ses livres, reproches qu'elles ne songeraient pas à adresser aux textes des hommes.

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