Le fonctionnement du capitalisme (1)
Karl Marx, Le capital, Paris : Éd. Sociales, 1975, Livre I, tome 1, 317 p.
Avertissement aux lecteurs du Livre I du Capital par L. Althusser
Préface de la première édition
« Ma méthode dialectique, non seulement diffère par la base de la méthode hégélienne, mais elle en est même l'exact opposé. Pour Hegel, le mouvement de la pensée qu'il personnifie sous le nom de l'idée, est le démiurge de la réalité, laquelle n'est que la forme phénoménale de l'idée. Pour moi, au contraire, le mouvement de la pensée n'est que la réflexion du mouvement réel, transporté et transposé dans le cerveau de l'homme. (…) Chez lui, elle marche sur la tête ; il suffit de la remettre sur les pieds pour lui trouver la physionomie tout à fait raisonnable. » (29)
« Sous son aspect mystique, la dialectique semble glorifier les choses existantes ». Sous son aspect « rationnel », elle « inclut l'intelligence de leur négation fatale, de leur destruction nécessaire ». Elle est « essentiellement critique et révolutionnaire. » (29)
Première section : La marchandise et la monnaie
Chapitre I : La marchandise
Les deux facteurs de la marchandise : valeur d'usage et valeur d'échange ou valeur proprement dite. (Substance de la valeur, Grandeur de la valeur)
La marchandise est la forme élémentaire de l'immense accumulation capitaliste. Elle est « d'abord un objet extérieur, une chose qui, par ses propriétés, satisfait des besoins humains de n'importe quelle espèce ». (51) Cette utilité d'une chose fait de celle-ci. « une valeur d'usage » qui est « déterminée par les propriétés du corps de la marchandise, elle n'existe point sans lui. » (52) « Les valeurs d'usage ne se réalisent que dans l'usage ou la consommation. Elles forment la matière de la richesse. » (52) Elles sont « les soutiens matériels de la valeur d'échange. » (52)
« La valeur d'échange apparaît d'abord comme le rapport quantitatif, comme la proportion dans laquelle les valeurs d'usage d'espèce différente s'échangent l'une contre l'autre, rapport qui change constamment avec le temps et le lieu. » (52) Elle a donc « un contenu distinct de ces expressions diverses. » (53) Ainsi les valeurs d'usage ne sont rapportées qu'à une utilité dont on fait abstraction quand on les échange : « tout rapport d'échange est même caractérisé par cette abstraction. » (53) Il existe donc entre les valeurs d'usage échangées un rapport de proportion.
Ainsi, « comme valeurs d'usage, les marchandises sont avant tout de qualité différente ; comme valeurs d'échange, elles ne peuvent être que de différente quantité. » (53) Une fois écartée la valeur d'usage des marchandises, il ne reste plus qu'une seule qualité, « celle d'être des produits du travail ». Il ne reste donc plus que le caractère commun de ces travaux et sont tous ramenés au même travail humain, « à une dépense de force humaine de travail, sans égard à la forme particulière sous laquelle cette force a été dépensée. » (54) Ces produits sont « des cristaux de cette substance sociale commune [le travail], ils sont réputés, valeurs. » (54) Le point commun qui se manifeste donc dans le rapport d'échange des marchandises est donc leur valeur ; « et une valeur d'usage ou un article quelconque n'a une valeur que autant que du travail humain est matérialisé en lui. » Comment mesurer la grandeur de la valeur contenue ? Par la quantité de travail contenue en lui. Celle-ci s'est réalisée par la dépense d'une force socialement disponible : cette force de travail est une force sociale « moyenne », c'est-à-dire utilisant dans la production d'une marchandise « que le temps de travail nécessaire en moyenne ou le temps de travail nécessaire socialement » (54) c'est-à-dire un travail « exécuté avec le degré moyen d'habilité et d'intensité et dans des conditions qui, par rapport au milieu social donné, sont normales. » (55) Donc, le temps de travail nécessaire à une production est caractéristique d'une société donnée. Aussi, à chaque modification de la force productive de travail innovante, se modifie la quantité de valeur contenue dans une marchandise : développement des sciences, nouvelles technologies, habilité moyenne des travailleurs...
La substance de la valeur : c'est le travail. La mesure de sa quantité : c'est la durée du travail.
Notons qu'une chose peut-être une valeur d'usage sans être une valeur, quand elle est utile, mais qui ne provient pas du travail : l'air, les prairies naturelles, le sol vierge, etc. Elle peut être utile et produit du travail humain sans être une marchandise : autoproduction. « Pour produire des marchandises, [le travail] doit non seulement produire des valeurs d'usage, mais des valeurs de usage pour d'autres, des valeurs d'usage sociales. » (56)
Double caractère du travail présenté par la marchandise
La marchandise apparaît donc à la fois comme valeur d'usage et valeur d'échange. La valeur d'usage recèle un travail utile répondant à un but particulier. Des valeurs d'usage existent comme marchandises que si elles contiennent des travaux utiles de qualité différente. Plus généralement, le travail « est la condition indispensable de l'existence de l'homme, une nécessité éternelle, le médiateur de la circulation matérielle entre la nature et l'homme. » (58) Rien ne se fait sans elle, l'homme ne faisant que « changer la forme des matières » dans la « dépense de force humaine », qui est « plus ou moins développée » (59) : « force simple » que tout homme ordinaire possède ; travail « complexe », qui est un travail simple multiplié : « une quantité donnée de travail complexe correspond à une quantité plus grande de travail simple. » (59) Pour interroger le travail contenu dans la marchandise, il faut savoir « comment le travail se fait et ce qu'il produit » et « combien de temps il dure ». (60)
« A une masse croissante de la richesse matérielle peut correspondre un décroissement simultané de sa valeur. Ce mouvement contradictoire provient du double caractère du travail. (...) Tout changement, dans la force productive qui augmente la fécondité du travail et par conséquent la masse des valeurs d'usage livrées par lui, diminue la valeur de cette masse, ainsi augmenter, s'il raccourcit le temps total de travail nécessaire à sa production, et il en est de même inversement. » (61) Tout travail est donc dépense de force humaine formant la valeur des marchandises et donc mesurable. Et il est dépense de force humaine dans tel rapport social déterminé donnant lieu à une production de valeurs d'usage ou utilités. Le travail est donc à la fois travail abstrait et travail concret.
Forme de la valeur
Les marchandises ne sont marchandises que parce qu'elles sont deux choses à la fois, « objet d'utilité et porte valeur ». (62) Ce n'est qu'à cette condition qu'elles entrent dans la circulation. Elles prennent une forme qui contraste avec les formes naturelles diverses : la forme monnaie. Il s'agit de fournir la genèse de cette forme monnaie.
A) La forme simple ou accidentelle de la valeur :
Les deux pôles de l'expression de la valeur :
sa forme relative et sa forme équivalent : X marchandises A égalent Y marchandises B, ou, un habit égale 20 m de toile. La toile exprime sa valeur dans l'habit et celui-ci sert de matière à cette expression. La première marchandise joue un rôle actif la seconde un rôle passif. « La valeur de la première est exposée comme valeur relative, la seconde marchandise fonctionne comme équivalent. » (63) Ces deux formes sont « inséparables, mais, en même temps, des extrêmes opposés, exclusifs l'un de l'autre, c'est-à-dire des pôles de la même expression de la valeur. » (63) La valeur de la toile ne peut être exprimée que dans une autre marchandise, c'est-à-dire relativement. La seconde est donc un équivalent, fournissant l'expression de la valeur de la première marchandise.
La forme relative de la valeur :
pour que des choses différentes soient comparables quantitativement, il faut les ramener à la même unité. ainsi « en tant que valeurs, toutes les marchandises ne sont que du travail humain cristallisé » [et donc] nous les ramenons par notre analyse à l'abstraction valeur, mais, avant, comme après, elle ne possède qu'une seule forme, leur forme naturelle d'objets utiles. Il en est tout autrement dès qu'une marchandise est mise en rapport de valeur avec une autre marchandise. Dès ce moment, son caractère de valeur ressort, et s'affirme comme sa propriété inhérente qui détermine sa relation avec l'autre marchandise. » (65) Dans ce processus le travail « forme bien de la valeur, mais n'est pas valeur. Il ne devient valeur qu’à l’état coagulé, sous forme d'un objet. » (65) C'est comme cela que la marchandise acquiert une valeur relative : relative à la quantité de travail nécessaire à sa production, ce qui permet simultanément de mesurer cette valeur. La valeur d'une marchandise n'existe donc que dans ses relations avec une autre marchandise. « Si les valeurs de toutes les marchandises augmentaient ou diminuaient simultanément et dans la même proportion, leur valeur relative n'éprouverait aucune variation.
Forme équivalent et ses particularités :
ramenées à du travail humain, en tant que valeurs toutes les marchandises sont remplaçables les unes par les autres, échangeables avec d'autres marchandises. Dès qu'elle possède une forme qui la fait apparaître comme valeur, la marchandise est alors un équivalent : « la forme équivalent est donc pour une marchandise la forme sous laquelle elle est immédiatement échangeable avec une autre. » (69) « Que dans le rapport de valeur, l'habit figure comme équivalent et la toile comme valeur relative, ou que ce soit l'inverse, la proportion dans laquelle se fait l'échange reste la même. » (69) La première particularité de la forme équivalent c'est que « la valeur d'usage devient la forme de manifestation de son contraire, la valeur. » (70) Et pour cela elle a besoin d'une autre marchandise, car aucune marchandise ne peut se rapporter à elle-même comme équivalent. Sa deuxième particularité est que « le travail concret devient la forme de manifestation de son contraire, le travail humain abstrait. » (72) « Pour exprimer, par exemple que le tissage non comme tel, mais en sa qualité de travail humain en général forme la valeur de la toile, on lui oppose un autre travail, celui qui produit l'habit, l'équivalent de la toile, comme la forme expresse dans laquelle le travail humain se manifeste. Le travail du tailleur est ainsi métamorphosé en simple expression de sa propre qualité abstraite. » (72) La troisième particularité tient à cette nature du travail, qui possède la forme de l'égalité avec un autre travail : quoique travail privé, comme tout autre travail productif de marchandises, il est travail sous forme sociale immédiate. Cette découverte (ce processus d'abstraction) n'est possible que, lorsque la société voit la forme marchandise devenue la forme générale des produits du travail, et donc que « le rapport des hommes entre eux comme producteurs et échangistes de marchandises est le rapport social, dominant. » (73)
Ensemble de la forme valeur simple :
la forme simple d'une marchandise est donc la simple forme d'apparition des contrastes qu'elle recèle, c'est-à-dire de la valeur d'usage et de la valeur. Si le produit du travail est toujours objet d'utilité, il n'y a qu'une époque qui transforme le produit du travail en marchandise, « C'est celle où le travail dépensé dans la production des objets utiles revêt le caractère d'une qualité inhérente à ces choses, de leur valeur. Le produit du travail acquiert la forme marchandise, dès que sa valeur acquiert la forme de la valeur d'échange, opposée à sa forme naturelle ; dès que, par conséquent, il est représenté comme l'unité dans laquelle se fondent ces contrastes. La forme simple de la valeur de la marchandise est aussi la forme primitive dans laquelle le produit du travail se présente comme marchandise. » (75)
B) Forme valeur totale ou développée :
La forme développée de la valeur relative : la valeur d'une marchandise, une toile par exemple, est maintenant représentée dans d'autres éléments innombrables. Elle se reflète dans tout autre corps de marchandise comme en un miroir. « La forme totale de la valeur relative met une marchandise en rapport social avec toutes. En même temps, les séries interminables de ses expressions démontre que la valeur des marchandises revêt indifféremment toute forme particulière de valeur d'usage. » (76) Ce n'est pas l'échange qui règle la quantité de valeur d'une marchandise, mais au contraire, « la quantité de valeur de la marchandise qui règle ses rapports d'échange. » (76)
La forme équivalent particulière.
Défauts de la forme, valeur totale ou développée : chaque travail utile, concret, contenu dans chaque équivalent, ne présente qu'une forme particulière, c'est-à-dire une manifestation incomplète du travail humain.
C) Forme valeur générale :
Changement de caractère de la forme valeur : aux époques primitives, les produits du travail n'étaient transformés en marchandise que par des échanges accidentels ou isolés (sous la forme du troc). Quand l'échange est installé, les formes équivalents sont elles aussi fixées (troc développé). Mais l'expression générale de la valeur relative possède une seule et même forme valeur différente de sa forme naturelle. La valeur de chaque marchandise est maintenant distincte de sa propre valeur d'usage, mais aussi de toutes les autres valeurs d'usage. Cette forme fait apparaître les marchandises comme des valeurs d'échange les unes vis-à-vis des autres. Chaque nouvelle marchandise doit désormais exprimer sa valeur dans cet équivalent. La forme naturelle d'une marchandise devient donc en même temps sa forme sociale exprimée comme du travail social, c'est-à-dire une forme d'égalité avec tous les autres travaux.
Rapport de développement de la forme valeur relative de la forme équivalent : chacune des formes peut être indistinctement forme équivalente ou forme relative.
Transition de la forme générale à la forme argent : « La forme équivalent général est une forme de la valeur en général. Elle peut donc appartenir à n'importe quelle marchandise. » (81) Elle est exclue elle-même par toutes les autres marchandises comme équivalent. « Ce n'est qu'à partir du moment où ce caractère exclusif vient s'attacher à un genre spécial de marchandises, que la forme valeur relative prend consistance, se fixe dans un objet unique et acquiert une authenticité sociale. » (81) C'est donc le rôle de la monnaie de jouer le rôle de l'équivalent universel dans le monde des marchandises.
D) Forme monnaie ou argent :
Si des changements essentiels ont lieu dans la transition de la forme I à la forme II, et de la forme II à la forme III, la forme IV au contraire ne diffère en rien de la forme III si ce n'est que maintenant c'est l'or qui possède (dans notre exemple) à la place de la toile la forme équivalent général. « Dès qu'il a conquis le monopole de cette position dans l'expression de la valeur du monde marchand, il devient marchandise monnaie. » (82) Faute de prendre en compte le processus historique qui amène à ce monopole, on en reste à considérer l'or comme chez les économistes classiques à une forme naturelle. Aussi il faut entendre par économie politique classique, « tout économie qui cherche à pénétrer l'ensemble réel et intime des rapports de production dans la société bourgeoise, par opposition à l'économie vulgaire qui se contente des apparences. » (83)
Le caractère fétiche de la marchandise et son secret
Contre l'idée ordinaire de la marchandise comme quelque chose de trivial et qui se comprend de soi-même, l'analyse montre qu'il est à la fois saisissable (comme objet matériel) est insaisissable (comme valeur). Le caractère mystique de la marchandise ne provient donc pas de sa valeur d'usage. Processus : « le caractère d'égalité des travaux humain acquiert la forme de valeur des produits du travail ; la mesure des travaux individuels par leur durée acquièrent la forme de la grandeur de valeur des produits du travail ; enfin, les rapports des producteurs dans lesquels s'affirment les caractères sociaux de leurs travaux, acquièrent la forme d'un rapport social des produits du travail. » (84) L'objet, comme produit de ce processus, ne dit rien de celui-ci. Le « rapport social déterminé des hommes entre eux, revêt pour eux la forme fantastique d'un rapport des choses entre elles. » (85) Ici, on peut faire une analogie avec le monde religieux. Le fétichisme attaché aux produits du travail est inséparable du mode de production des marchandises. Ce n'est que parce que la production privée de produits entre dans la sphère de l'échange que les caractères de ces travaux privés deviennent sociaux, et donc de ce point de vue acquièrent « comme valeurs une existence sociale identique et uniforme, distincte de leur existence, matérielle et multiforme comme objets d'utilité. » (85) C'est même un double caractère social que revêtent ces objets : capable de satisfaire des besoins sociaux et s'intégrant dans la division sociale du travail ; satisfaisants les besoins des producteurs que parce qu'ils sont échangeables avec toutes les autres espèces de travail privé utile. « La valeur ne porte donc pas écrit sur le front ce qu'elle est. » (86) « La détermination de la quantité de valeur par la durée de travail est donc un secret caché sous le mouvement apparent des valeurs des marchandises. » (87)
Pour comprendre cela, il faut sortir du schéma des robinsonnades (premier niveau) cher à l'économie politique traditionnelle. En regardant ce qui précède le mode de production capitaliste, on observe un monde fait de dépendance entre serfs et seigneurs, vassaux et suzerains, laïques et clercs. La société est basée sur la dépendance personnelle et « tous les rapports sociaux apparaissent comme des rapports entre les personnes. Les travaux divers et leurs produits n'ont en conséquence pas besoin de prendre une figure fantastique et distincte de la réalité. Ils se présentent comme services, prestations et livraisons en nature. La forme naturelle du travail, sa particularité – et non sa généralité, son caractère abstrait, comme dans la production marchande – en est aussi la forme sociale. » (89) On peut trouver du travail commun, c'est-à-dire de l'association immédiate dans le travail paysan (deuxième niveau) qui produit pour ses propres besoins, et ces produits ne se présentent pas comme des marchandises puisqu'ils sont consommés sur place. Chaque travail individuel s'inscrit ici dans la force commune de la famille. Si on imagine, une réunion d'hommes libres (troisième niveau) : « Le temps de travail jouerait un double rôle. D'un côté, sa distribution dans la société règle le rapport exact des diverses fonctions aux divers besoins ; de l'autre, il mesure la part individuelle de chaque producteur dans le travail commun, et en même temps la portion qui lui revient dans la partie du produit commun réservé à la consommation. » Les rapports sociaux sont « transparents ». (90)
La religion joue dans ce processus un rôle en ce qu'elle fonde un culte « de l'homme abstrait ». (90)
Chapitre II : Des échanges
Les échanges reposent sur l'existence de propriétaires privés qui doivent se reconnaître réciproquement par un rapport juridique, le contrat, légalement, développé ou non, qui n'est « que le rapport des volontés dans lequel se reflète le rapport économique. » (95) Pour l'échangiste, l'objet n'a pas de valeur utile immédiate. « La seule valeur utile qu'il lui trouve, c'est qu'elle est porte-valeur utile à d'autres et, par conséquent, un instrument d'échange. Il veut donc l'aliéner pour d'autres marchandises, dont la valeur d'usage puisse le satisfaire. » (96) Toutes les marchandises sont donc des non-valeurs d'usage pour certains et des valeurs d'usage pour ceux qui ne les possèdent pas. C'est l'échange qui les transforme en valeur. Mais il faut que leur valeur d'usage ait été auparavant constaté, en tant qu'elle peut être utile à d'autres, et seul échange peut le démontrer. L'échange est à la fois un acte individuel, puisque c'est la recherche d'une valeur d'usage utile pour un individu, et en même temps il s'inscrit comme acte social général. L'équivalent général nécessaire à ces transactions (la monnaie) ne peut être le résultat que d'une action sociale. « Une marchandise spéciale est donc mise à part par un acte commun des autres marchandises et sert à exposer leurs valeurs réciproques. La forme naturelle de cette marchandise devient ainsi la forme équivalent socialement valide. Le rôle d'équivalent général est désormais la fonction sociale spécifique de la marchandise exclue, et elle devient argent. » (97) Donc, d'une part, il faut que les choses soient extérieures à l'homme et soient par conséquent aliénables. Et d'autre part que les personnes soient indépendantes les unes des autres : « l'échange des marchandises commence là où les communautés finissent. » (98) Au cours du temps, une partie au moins des objets utiles est produit intentionnellement en vue de l'échange. « À partir de cet instant s’opère d'une manière nette la séparation entre l'utilité des choses pour les besoins immédiats et leur utilité pour l'échange à effectuer entre elles, c'est-à-dire entre leur valeur d'usage et leur valeur d'échange. » La proportion dans laquelle se fixe l'échange s'établit : « l'habitude les fixe comme quantités de valeur. » (98) Ce sont les peuples nomades qui développent les premiers la forme argent parce que tous leur bien et tous leur avoir se trouvent sous forme mobilière, et par conséquent immédiatement aliénables. Et leur genre de vie les met constamment en contact avec des sociétés étrangères les sollicitant donc pour l'échange de produits. Les liens locaux sont progressivement brisés. L'or et l'argent deviennent les équivalents universels, car ils ne sont susceptibles de différences que purement quantitatives, et sont divisibles à volonté. Il faut voir que « sous l'apparence d'un objet extérieur, la monnaie déguise en réalité un rapport social. Dans ce sens, toute marchandise serait un signe, parce qu'elle n'est valeur que comme enveloppe matérielle du travail humain dépensé dans sa production. » (101)
Chapitre III : La monnaie ou la circulation des marchandises
Mesure des valeurs
La première fonction de l'or est d'être « une mesure universelle des valeurs. » (104)
Moyen de circulation
La monnaie ou l'argent
Deuxième section : la transformation de l'argent en capital
Chapitre IV : La formule générale du capital
La circulation des marchandises est le point de départ du capital. Et l'argent est la première forme d'apparition de celui-ci. (La différence de « puissance entre la propriété foncière basée sur des rapports personnels de domination et de dépendance et la puissance impersonnelle de l'argent se trouve résumée dans un dicton français : l'argent n'a pas de maître. ») « L'argent en tant qu'argent et l'argent en tant que capital ne se distinguent de prime abord que par leurs différentes formes de circulation. » (151) C'est le cycle A-M-A qui transforme l'argent en capital.
Dans le cercle M–A–M le point final est une autre marchandise qui ne circule plus et tombe dans la consommation satisfaisant un besoin, une valeur d'usage. Alors que le cercle A–M–A a pour départ l'argent et y revient : son but est donc la valeur d'échange. Ce qui distingue une somme d'argent d'une autre, c'est sa quantité. La différence entre A' et A, l'excédent, c'est la plus-value : « non seulement donc la valeur avancée se conserve dans la circulation, mais elle y change encore sa grandeur, y ajoute un plus, se fait valoir davantage, et c'est ce mouvement qui la transforme en capital. (155) Si l'argent cesse de circuler, il cesse de fonctionner comme capital. « La circulation de l'argent comme capital possède au contraire son but en elle-même ; car ce n'est que par ce mouvement toujours renouvelé que la valeur continue à se faire valoir. Le mouvement du capital n'a donc pas de limite. » (156) L'individu qui conduit ce mécanisme de manière consciente devient capitaliste. « La valeur d'usage ne doit donc jamais être considérée comme le but immédiat du capitaliste, pas plus que le gain isolé ; mais bien le mouvement incessant du gain toujours renouvelé. » (157) Le capitaliste est un thésauriseur rationnel. La valeur dégagée par ce mouvement se présente « comme une substance automatique, douée d'une vie propre, qui, tout en échangeant, ses formes sans cesse, change aussi de grandeur. » (158) Cette forme propre, elle ne la possède que dans l'argent. « A–M–A' est donc réellement la formule général du capital tel qu'il se montre dans la circulation. » (159)
Chapitre V : Les contradictions de la formule générale du capital
Que l'on échange des équivalents ou des non-équivalents, la circulation ou l'échange de marchandises en elle-même ne crée pas de plus-value. Le capital commercial dégage une plus-value dans le schéma A–M–A' en achetant pour vendre plus cher : le commerçant apparaît ici, comme « intermédiaire parasite » (167). La transformation de l'argent en capital se passe dans la sphère de la circulation, et en même temps ne peut pas s'y réduire. « Telles sont les conditions du problème. » (169)
Chapitre VI : L'achat et vente de la force de travail
Donc, « l'accroissement de valeur par lequel l'argent doit se transformer en capital ne peut pas provenir de cet argent lui-même. S'il sert de moyen d'achat ou de moyen de paiement, il ne fait que réaliser le prix des marchandises qu'il achète ou qu'il paye.» S'il reste tel quel, il demeure une valeur « pétrifiée ». (170) Où trouver cette marchandise qui permet d'accroître la valeur sinon dans la force de travail : « Ensemble des facultés physiques et intellectuelles qui existent dans le corps d'un homme, dans sa personnalité vivante, et qu'il doit mettre en mouvement pour produire des choses utiles. » (170) Pour que le possesseur d'argent trouve sur le marché une telle force de travail, il faut que certaines conditions soient remplies. D'abord que cette force se présente comme marchandise, c'est-à-dire qu'elle soit « offerte ou vendue par son propre possesseur. Celui-ci doit par conséquent pouvoir en disposer, c'est-à-dire être libre propriétaire de sa puissance de travail, de sa propre personne. » (171) Ainsi, sur le marché, ces deux possesseurs (argent et force de travail) sont juridiquement égaux. « Pour que ce rapport persiste, il faut que le propriétaire de la force de travail ne la vende jamais que pour un temps déterminé. » (171) Ensuite, il faut que le possesseur de la force de travail « soit forcé d'offrir et de mettre en vente, comme une marchandise, sa force de travail elle-même, laquelle ne réside que dans son organisme. » (171) Quiconque veut vendre des marchandises distinctes de sa propre force de travail, doit simultanément posséder des moyens de production comme des matières premières ou outils. Ainsi, la transformation de l'argent en capital exige que le possesseur d'argent trouve sur le marché. « le travailleur libre », comme personne libre, disposant à son gré de sa force de travail, comme sa marchandise à lui, et ne possédant pas d'autres marchandises à vendre.
Ce rapport n'a pas de fondement naturel et n'est pas un rapport social commun à toutes les périodes de l'histoire. Il est le résultat d'un développement historique préliminaire ayant détruit de vieilles formes de production sociale. Aussi longtemps que les produits du travail servent à satisfaire immédiatement les besoins de son producteur, il n'est pas marchandise. Ses produits ne deviennent marchandises que dans le cadre du mode de production capitaliste. Les seules circulation des marchandises et de la monnaie ne suffisent pas à créer les conditions historiques de l'émergence du capital. « Il ne se produit que là où le détenteur des moyens de production et de subsistance rencontre sur le marché le travailleur libre qui vient y vendre sa force de travail. » (173)
Comment déterminer la valeur de la force de travail ? Par le temps de travail nécessaire à sa production : « en tant que valeur, la force de travail représente le quantum de travail social réalisé en elle. Mais elle n'existe en fait que comme puissance ou faculté de l'individu vivant. L'individu étant donné, il produit sa force vitale en se reproduisant ou en ce conservant lui-même. (…) Le temps de travail nécessaire à la production de la force de travail se résout donc dans le temps de travail nécessaire à la production de ses moyens de subsistance ; ou bien, la force de travail a juste la valeur des moyens de subsistance nécessaires à celui qui la met en jeu. » (174) Plus l'usure de la force est grande, plus grands sont les frais de réparation. D'autant plus que le propriétaire de la force de travail doit pouvoir recommencer le lendemain dans les mêmes conditions de vigueur et de santé. Les besoins naturels diffèrent d'un climat à un autre et des particularités physiques d'un pays à un autre. Mais la satisfaction des besoins naturels est aussi un produit historique. « La force de travail renferme donc au point de vue de la valeur, un élément moral et historique ; ce qui la distingue des autres marchandises. Mais pour un pays et une époque donnée, la mesure nécessaire des moyens de subsistance est aussi donnée. » (174) Pour que ces forces de travail se créent et se perpétuent, il faut aussi une certaine éducation qui coûte elle-même une somme plus ou moins grande. Cette somme variant selon le caractère plus ou moins complexe de la force de travail. Les frais d'éducation entrent donc dans le total des marchandises nécessaires à sa production. Le prix de la force de travail est à son minimum, lorsqu'il est réduit à la valeur des moyens de subsistance physiologiquement indispensable. Le travailleur vend sa force à crédit, car elle n'est payée que lorsqu'elle a déjà fonctionné pendant un certain temps fixé par le contrat.
Ainsi, « la consommation de la force de travail est en même temps production de marchandises et de plus-value. Elle se fait comme la consommation de toute autre marchandise, en dehors du marché ou de la sphère de circulation. » (178) La production de la plus-value peut enfin être dévoilée. Les valeurs qui règnent sur le marché (et dans la société) sont : la liberté (ni l'acheteur ni le vendeur d'une marchandise n'agissent par contrainte, ils agissent par leur libre arbitre, passent un contrat de personnes libres possédant les mêmes droits) ; l'égalité (ils échangent équivalent contre équivalent) ; propriété (chacun ne dispose que de ce qui lui appartient).
Troisième section : la production de la plus-value absolue
Chapitre VII : La production de valeurs d'usage et production de la plus-value
La production de valeur d'usage
C'est le produit du travail, « un acte qui se passe entre l'homme et la nature. L'homme, il joue lui-même vis-à-vis de la nature, le rôle d'une puissance naturelle. Les forces dont son corps est doué, bras et jambes, tête et mains, il les met en mouvement, afin de s'assimiler des matières en leur donnant une forme utile à sa vie. » (180) Le travail humain se distingue de l'activité animale en ce qu'il « préexiste idéalement dans l'imagination du travailleur ». (181) L'activité globale est donc « un procès de travail » qui se décompose en : 1) activité personnelle, de l'homme, ou travail proprement dit ; 2) objet sur lequel le travail agit ; 3) moyen par lequel il agit.
La terre et l'eau fournissent à l'homme un objet universel de travail dont il s'agit simplement de détacher les choses de leur support ou leur milieu.
Le moyen de travail est une chose ou un ensemble de choses que l'homme interpose entre lui et l'objet de son travail comme conducteur de son action. Basiquement, ce sont d'abord les organes de l'homme qui sont ses moyens de travail. Ensuite, il se sert des éléments fournis par son milieu comme la pierre ou l'animal (dompté) par exemple. La terre devient un moyen de travail en tant que telle dans l'agriculture, après que toute une série d'autres moyens aient été donnés. « L'emploi et la création de moyens de travail caractérisent éminemment le travail humain. » (182) L'homme est un animal fabricateur d'outils. « Ce qui distingue une époque économique d'une autre, c'est moins ce que l'on fabrique, que la manière de fabriquer, les moyens de travail par lesquels on fabrique. » (182) Les moyens de travail comprennent toutes les conditions matérielles, y compris la terre, Mais aussi tout ce qui est le résultat d'un travail antérieur, comme les ateliers, les chantiers, les canaux, les routes, etc.
« Le procès s'éteint dans le produit, c'est-à-dire, dans une valeur d'usage, une matière naturelle assimilée aux besoins humains par un changement de forme. » (183)
« Si l'on considère l'ensemble de ce mouvement, au point de vue de son résultat, du produit, alors tous les deux, moyen et objet de travail se présentent comme moyen de production, et le travail lui-même comme travail productif. » (183) Les produits ne sont pas seulement des résultats, mais encore des conditions du procès de travail. La matière première peut former la substance principale d'un produit, ou n'y entrer que sous la forme de matières auxiliaires. Par exemple la rouille par la machine à vapeur, l'huile par la roue, le foin pour le cheval de trait. Ou elle est jointe à la matière première pour y opérer une modification, par exemple le charbon au fer, la couleur à la laine. En vertu des propriétés diverses d'une chose, celle-ci peut servir à plus d'une application et donc fournir la matière première de différentes opérations. « Le caractère de produit, de matière première ou de moyen de travail ne s'attache à une valeur d'usage que suivant la position déterminée qu'elle remplit dans le procès de travail, que d'après la place qu'elle y occupe, et son changement de place change sa détermination. » (185) Mais quel que soit l'usage et la place de ces produits, ce n'est que dans le contact avec le travail vivant que les résultats du travail passé peuvent être conservés et utilisés. « Le travail use ses éléments matériels, son objet et ses moyens, et est, par conséquent, un acte de consommation. Cette consommation productive se distingue de la consommation individuelle, en ce que celle-ci consomme les produits comme moyens de jouissance de l'individu, tandis que celle-là les consomme comme moyen de fonctionnement du travail. » (185)
Le procès de travail est « la condition générale des échanges matériels entre l'homme et la nature, une nécessité physique de la vie humaine, indépendante par cela même de toutes ses formes sociales, ou plutôt également commune à toutes. » (186) Peu importe au fond les conditions concrètes dans lesquelles s'accomplit ce procès, à ce stade, le but est la valeur d'usage. La nature générale du travail ne se modifie pas si le cadre dans lequel il s'effectue change. Dans le mode de production capitaliste, l'ouvrier travaille sous le contrôle du capitaliste auquel son travail appartient, et le produit est la propriété du capitaliste et non du producteur immédiat.
La production de la plus-value
Si la marchandise est à la fois valeur d'usage et valeur d'échange, alors sa production est à la fois formation de valeur d'usage et formation de valeur. Ainsi, le travail doit être dépensé sous une forme utile pour produire de la valeur. Et c'est l'utilité spécifique du travail que « d'être, source de valeur et de plus de valeur qu'elle n'en possède elle-même. » (194) Mais, « si le procès de travail ne dure que jusqu'au point où la valeur de la force de travail payée par le capital est remplacée par un équivalent nouveau, il y a simple production de valeur ; quand il dépasse cette limite, il y a production de plus-value. » (195)
Quand est produite de la valeur d'usage, le procès de travail se présente au point de vue de la qualité, ayant pour but de satisfaire des besoins déterminés. « Par contre, comme production de valeur, le même procès ne se présente qu'au point de vue de la quantité. » (195) Mais ce calcul du temps s'inscrit dans « un temps socialement nécessaire » pour le dire autrement dans des conditions normales. Ces facteurs matériels du travail dépendant avant tout du capitaliste. Mais le caractère normal s'applique aussi à la force du travail puisqu'elle doit posséder « le degré moyen d'habilité, d'adresse et de célérité » et « doit fonctionner avec un degré d'intensité habituel ». (196) Enfin, la consommation des moyens de production, doit se faire d'une manière normale, sans gaspillage. La production marchande devient production capitaliste dès qu'elle devient unité de travail utile et de travail créateur de plus-value.
Chapitre VIII : Le capital constant et capital variable
« L'excédent de la valeur du produit sur la valeur de ses éléments constitutifs est l'excédent du capital accru de sa plus-value sur le capital avancé. Moyens de production aussi bien que force de travail ne sont que les diverses formes d'existence qu'a revêtues la valeur-capital lorsqu'elle s'est transformé d'argent en facteurs du procès de travail. Dans le cours de la production, la partie du capital qui se transforme en moyen de production, c'est-à-dire en matières premières, matières auxiliaires et instruments de travail, ne modifie donc pas la grandeur de sa valeur. C'est pourquoi nous la nommons partie constante du capital, ou plus brièvement : capital constant. La partie du capital transformée en force de travail change, au contraire, de valeur dans le cours de la production. Elle reproduit son propre équivalent et de plus un excédent, une plus-value qui peut elle-même varier et être plus ou moins grande. Cette partie du capital se transforme sans cesse de grandeur constante en grandeur variable. C'est pourquoi nous la nommant partie variable du capital, ou plus brièvement : capital variable. Les mêmes éléments du capital qui, au point de vue de la production des valeurs d'usage, se distinguent entre eux comme facteurs objectifs et subjectifs, comme moyens de production et force de travail, se distinguent, au point de vue de la formation de valeur, en capital, constant et en capital variable. » (207)
Chapitre IX : Le taux de la plus-value
Le degré d'exploitation de la force de travail
Le temps de travail nécessaire : c'est la partie de la journée où la reproduction s'accomplit ;
Le travail nécessaire : « c'est le travail dépensé pendant ce temps : nécessaire pour le travailleur, parce qu'il est indépendant de la forme sociale de son travail ; nécessaire pour le capital et le monde capitaliste, parce que ce monde a pour base l'existence du travailleur. » (214)
Le surtravail : partie de la journée de travail dépassant les bornes du travail nécessaire.
Expression de la valeur du produit en parties proportionnelles du même produit
On peut décomposer le produit du travail en une quantité représentant le travail contenu dans les moyens de production (partie constante du capital), une autre quantité représentant le travail nécessaire à sa production (partie variable du capital), et enfin une quantité ne représentant que le surtravail ajouté (plus-value).
La « dernière heure » de Senior
Le produit net
« Nous nommons produit net la partie du produit qui représente la plus-value. De même que le taux de celle-ci se détermine par son rapport non avec la somme totale mais avec la partie variable du capital, de même le montant du produit net est déterminé par son rapport, non avec la somme restante, mais avec la partie du produit qui représente le travail nécessaire. De même que la production d'une plus-value est le but de déterminant de la production capitaliste, de même le degré d'élévation de la richesse se mesure, non d'après la grandeur absolue du produit brut, mais d'après la valeur relative du produit. La somme du travail nécessaire et du surtravail, des parties de temps dans lesquelles l'ouvrier produit l'équivalent de sa force de travail et la plus-value, cette somme forme de la grandeur absolue de son temps de travail, c'est-à-dire la journée de travail. » (226)
Chapitre X : La journée de travail
Limite de journée de travail
Sa durée n'est pas constante. Elle est déterminée par la reproduction continue de l'ouvrier, mais sa grandeur totale varie suivant la longueur ou la durée du surtravail. Si la limite minimum ne peut être déterminée, en revanche, la limite maximum est doublement déterminée : par les bornes physiques de la force du travail et par les limites morales dépendant, « de l'état général de la civilisation ». (228) Des limites finalement très élastiques : « le capital est du travail, mort, qui, semblable aux vampires, ne s'anime qu'en suçant le travail vivant, et sa vie est d'autant plus allègre qu'il en pompe davantage. (…) Si le salarié consomme pour lui-même le temps qu'il a de disponible, ils vole le capitaliste. » (229) Chacun des protagonistes défend ses intérêts, lesquels sont scellés par la loi qui règle l'échange des marchandises. « Entre deux droits égaux, qui décide ? La force. Voilà pourquoi la réglementation de la journée de travail se présente dans l'histoire de la production, capitaliste, comme une lutte séculaire pour les limites de la journée de travail, lutte entre les capitalistes, c'est-à-dire la classe capitaliste, et le travailleur, c'est-à-dire la classe ouvrière. » (231)
Le Capital affamé de surtravail - Boyard et fabricant
Le surtravail n'existe pas que dans une société capitaliste. Mais celle-ci accroît la pression. Par exemple le travail des esclaves était modéré tant qu'il était dirigé vers la satisfaction des besoins immédiats. Mais à partir du moment où l'exportation du coton devient l'intérêt vital des États, alors les noirs américains sont surexploités. Une surexploitation qui se manifeste aussi par l'épuisement des sols, l'accroissement des épidémies périodiques, ou même la diminution de taille du soldat en France ou en Allemagne. (235)
La journée de travail dans les branches de l’industrie où l’exploitation n’est pas limitée par la loi.
Travail de jour et nuit. - Le système des relais
La prolongation de la journée de travail, au-delà des bornes du jour naturel est le moyen pour la production capitaliste de s'approprier le travail pendant les 24 heures du jour en faisant tourner les équipes.
La lutte pour la journée de travail normale - Lois coercitives pour la prolongation de la journée de travail depuis le milieu du XIV° jusqu’à la fin du XVII° siècle.
« Si l'utilisation des esclaves peut inciter leurs propriétaires à les ménager, car il s'agit après tout d'un capital, l'existence d'une réserve importante change la donne : « la durée de sa vie devient moins importante que sa productivité. (261) (Le capitaliste se soucie peu des conséquences de son action. « Dans tout affaire de spéculation, chacun sait que la débâcle viendra un jour, mais chacun espère qu'elle emportera son voisin, après qu'il aura lui-même recueilli la pluie d'or au passage et l'aura mis en sûreté. Après moi, le déluge ! Telle est la devise de tout capitaliste et de toute nation capitaliste. Le capital ne s'inquiète donc point de la santé et de la durée de vie du travailleur, s'il n'y est pas contraint par la société. » p. 264)
La lutte pour la journée de travail normale – La limitation légale coercitive du temps de travail - La législation manufacturière anglaise de 1833 à 1864
La lutte pour la journée de travail normale. Contrecoup de la législation anglaise sur les autres pays.
Chapitre XI : Taux et masse de la plus-value
« Le taux de la plus-value détermine donc la somme de plus-value produite par un ouvrier individuel, la valeur de sa force étant donnée. » Mais il y a des cas « où la plus-value produite n'augmente pas proportionnellement au nombre des ouvriers exploités. » (297)
Une diminution du capital variable ne peut être compensée par l'élévation du taux de la plus-value que dans les limites physiologiques de la journée du travail et par conséquent du surtravail qu'elle renferme. Ces deux facteurs déterminants, augmenter la plus-value le plus possible et diminuer au minimum la partie variable (le nombre d'ouvriers exploités), entrent donc en contradiction. Si on généralise la division proportionnelle du capital avancé en partie constante et en partie variable, on arrive à la loi suivante : « la valeur de la force moyenne de travail et le degré moyen de son exploitation étant supposés égaux dans différentes industries, les masses de plus-values produites sont en raison directe de la grandeur des parties variables des capitaux employés, c'est-à-dire, en raison directe de leurs parties converties en force de travail. » (300)t
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