Aurélie Valognes : L’envol



 Aurélie Valognes, L’envol, Fayard, 2023 (epub), 258 p. 

 
Les bons sentiments ne font pas forcément de la bonne littérature. Si l’auteure en matière de transclasse sait de quoi elle parle, son propos sur la mère dépassée par sa fille ne tient pas la route. La faute d’abord à un problème de statut : chacune à tour de rôle prend la parole, mais on ignore si la fille exprime une pensée d’enfant ou d’adulte se regardant. Dans le premier cas, celle-ci est nulle et non avenue tant l’enfant paraît dépasser sa mère de la tête et des épaules. Dans le second cas c’est un peu la même chose, puisqu’elle se prête une maturité improbable. A donc vouloir faire de son histoire quelque chose de démonstratif, elle tombe dans la caricature. Certes elle retranscrit avec une certaine justesse sa découverte du milieu des grandes écoles dans laquelle la consonance des noms de famille ne montre aucune présence de double culture : « les de machins se succèdent, et quand ce n'est plus le cas, ce sont des Archambault, des Barons, des Lépine… On sent que dans leur famille, il y a des terres, des châteaux, des titres. » Mais on ne peut qu'être surpris par la réaction de la mère devant un tableau de peinture pour lequel elle demande s’il s'allume (sous-entendu par des néons) : on a en effet du mal à penser que sa mère soit ignorante à ce point. Par contre sa réaction sur la dépense occasionnée par l'acquisition de cette œuvre d'art tombe assez juste : « c'est juste pour afficher que tu as les moyens et que les autres non ! Qui tu cherches impressionner comme ça ? Ta mère ? Tu veux prouver que tu vaux mieux que moi ? Que tu vaux mieux que le milieu d’où tu viens ? Mais c'est un truc d'apparence ma chérie. » La confrontation au milieu d'arrivée du transfuge, synonyme de gêne et de retenue est assez crédible. « A ne pas savoir reconnaître les girolles des chanterelles, les cèpes des bolets. Ne pas savoir plonger ou pêcher. Ne pas être capable de randonner pendant de longues heures. Ne pas pouvoir faire de balade à vélo, hors des pistes plates et goudronnées. Ne pas jouer au tennis. À rester sur le banc de touche, à ne pas pouvoir participer, à observer les autres. Spectatrice. Seule. » Mais au final, la volonté de vouloir rendre hommage à sa mère et à la vérité des sentiments qui les tiennent manque singulièrement de finesse et… de style.

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