Socio-genèse du talent
Samah Karaki, Le talent est une fiction, Jean-Claude Lattès, 2023, 305 p.
Après que les valeurs aristocratique fondées sur le privilège de la naissance et sur la hiérarchie des dignité ont disparu, un nouveau principe émerge, « les talents comme les lumières deviendront le patrimoine commun de la société » (Condorcet). (Cité page 33)
La déclaration des droits de l'homme prévoit, ainsi que les citoyens « sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ». La vertu se référant aux efforts individuels et le talent aux dons naturels. Le mot talent désigne des « dispositions et aptitudes naturelles pour certaines choses », selon la définition de l'époque. (33)
Idée pourtant, que le talent ou le génie n'existent pas à l'état pur. Edison, inventeur de l'ampoule, n'a pas réalisé son invention dans un flash d'inspiration, il n'a fait qu'améliorer des centaines de versions précédentes. (47)
De la même façon, on pourrait s'attendre à ce que des musiciens, ayant l'oreille absolue réussissent mieux dans le domaine musical que ceux qui ne l'ont pas ; mais ce n'est pas toujours vrai. Si par exemple on leur fait écouter un morceau dans la musique se désaccorde progressivement d'un tiers de notes sur plusieurs minutes, ces personnes peuvent se tromper en supposant que la musique est juste alors qu'elle est fausse. (59)
Pour montrer que le travail importe plus que les soi-disant don, des observations ont été établies sur trois groupes d'étudiants en musique : exceptionnels, bons, et moins capables. Ces trois groupes partageaient des biographie musicales similaires. L'âge auquel les étudiants avaient commencé à pratiquer est d'environ huit ans. Ils avaient décidé de devenir musicien vers 15 ans. Mais la différence entre les groupes venait du nombre d'heures consacré à la musique de manière sérieuse. À l'âge de 20 ans, les meilleurs violonistes avaient pratiqué en moyenne 10 000 h, les bons violonistes, 8000 h, et les moins bons 6000 h. Cette différence dans les heures de pratique s'est avérée être le seul facteur, distinguant les meilleurs des médiocres : il n'y avait donc aucun gène inné de la musique. (123)
De la même façon, le génie de Mozart est à discuter : les sept premières œuvres de Mozart, dans le genre du concerto pour piano, produit entre 11 et 16 ans, ne sont pas à proprement parler des œuvres personnelles, mais des arrangements d'œuvres d'autres compositeurs. Sa première œuvre reconnue comme chef-d'œuvre est à 21 ans, et il travaillait le genre depuis 10 ans. Il en va dans le même dans le milieu universitaire où l'on constate que 10 ans s'écoule entre leur premier ouvrage et leur meilleur ouvrage.
L'idée des 10 000 heures de pratique, ne tient pas compte de l'efficacité des stratégies, de pratique, ni du rôle d'autres facteurs influents telles que les opportunités d'apprentissage, l'appétence et les croyances des apprenants. La réussite issue de l'effort et le travail routinier n'explique qu'une petite partie de la variance des performances. « En réalité, un effort à besoin de support informationnel – il faut savoir où, et quand trouver l'importunité –, d'un support logistique – il faut savoir comment utiliser l'effort à bon escient, comment le faire fructifier –, et d'un soutien psychologique – il faut avoir ce qui permet de maintenir le désir quand la route est pénible et se battre contre les croyances limitantes qui vont paver le chemin de la réussite. » (134)
Une expérience montre que si l'on apprend aux enfants à résister à la tentation de goûter à une sucrerie, ils construisent des compétences générales verbales et un raisonnement mathématique plus élevé que les enfants qui ont cédé. En d'autres termes, nous avons plus de chance d'avoir un cerveau mieux développé et un contrôle de nos pulsions plus achevé. « Ce qui est mesuré, c'est en fait la capacité de résister à l'automatisme. » (137) Mais la même expérience effectuée sur un échantillon beaucoup plus large ne montre pas cette relation. Car il est difficile d'extraire un facteur quand il s'agit d'une combinatoire.
Mais l'observation de génies ou de précoce dans l'histoire montre qu'à chaque fois, il y a des raisons éducatives qui prévalent : Mozart avait cumulé 3500 heures de pratique avant six ans. Tiger Wood, où les sœurs Williams ont commencé à s'entraîner très jeunes. Ou Polgar a montré sur ses filles qu'il pouvait en faire des championne d'échecs en les éduquant précocement.
D'autres expériences montrent aussi que des élèves, jugés sur leur attractivité physique ont de meilleurs résultats en présentiel que dans des cours en ligne quand leur attractivité est supérieure. « Le talent » reconnu à une personne a donc des effets multiplicateurs (161). C'est ce qu'on appelle l'effet Pareto : un cinquième des chercheurs publient quatre cinquièmes des articles. De même, un cinquième des professionnels dans un domaine artistique donné reçoivent 80 % de l'ensemble des revenus distribués. Ainsi, de petits écarts de talent peuvent aboutir à d'énormes différences de succès à l'arrivée. « D'une manière générale, la méritocratie devient un dispositif qui vise à transformer des micros différences en macro distinctions entre ceux qui réussissent et ceux qui passent à la trappe. ». (162)
Quand les chercheurs évaluent le niveau de compétence de la musique écrite disponible pour les pianistes à différents moments de l'histoire, ils constatent que les compétences humaines récentes sont supérieures à celle d'autrefois. C'est tout simplement parce que aujourd'hui on pratique beaucoup plus.
« Les transclasses sont des cas singuliers, mais ils ne sont pas des cas d’exception. Ils n'échappent pas à leurs circonstances, mais ils les reconfigurent et les combinent autrement, sous l'effet de circonstances, d'appétences et de dispositifs. Ils impriment un nouveau cours à leur trajectoire singulière, qui s'intègre dans un contexte social et collectif. » (175) « Il n'y a pas de génie solitaire. »
« La théorie de l'estime de soi, qui faisait à l'origine partie d'un mouvement militant radical des années 1960 protestant contre l'oppression, s'est fait pendant les dernières décennies largement cooptée, a été détournée et revendue sous forme de mantra : « croyez en vous-même. » Bientôt, la confiance en soi est devenue la solution fourre-tout à tous nos problèmes, tout ce dont nous avions besoin était simplement un changement de perspective pour briser les barrières à l'école, au bureau, et dans la société en général. » (191)
La déclaration des droits de l'homme prévoit, ainsi que les citoyens « sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ». La vertu se référant aux efforts individuels et le talent aux dons naturels. Le mot talent désigne des « dispositions et aptitudes naturelles pour certaines choses », selon la définition de l'époque. (33)
Idée pourtant, que le talent ou le génie n'existent pas à l'état pur. Edison, inventeur de l'ampoule, n'a pas réalisé son invention dans un flash d'inspiration, il n'a fait qu'améliorer des centaines de versions précédentes. (47)
De la même façon, on pourrait s'attendre à ce que des musiciens, ayant l'oreille absolue réussissent mieux dans le domaine musical que ceux qui ne l'ont pas ; mais ce n'est pas toujours vrai. Si par exemple on leur fait écouter un morceau dans la musique se désaccorde progressivement d'un tiers de notes sur plusieurs minutes, ces personnes peuvent se tromper en supposant que la musique est juste alors qu'elle est fausse. (59)
Pour montrer que le travail importe plus que les soi-disant don, des observations ont été établies sur trois groupes d'étudiants en musique : exceptionnels, bons, et moins capables. Ces trois groupes partageaient des biographie musicales similaires. L'âge auquel les étudiants avaient commencé à pratiquer est d'environ huit ans. Ils avaient décidé de devenir musicien vers 15 ans. Mais la différence entre les groupes venait du nombre d'heures consacré à la musique de manière sérieuse. À l'âge de 20 ans, les meilleurs violonistes avaient pratiqué en moyenne 10 000 h, les bons violonistes, 8000 h, et les moins bons 6000 h. Cette différence dans les heures de pratique s'est avérée être le seul facteur, distinguant les meilleurs des médiocres : il n'y avait donc aucun gène inné de la musique. (123)
De la même façon, le génie de Mozart est à discuter : les sept premières œuvres de Mozart, dans le genre du concerto pour piano, produit entre 11 et 16 ans, ne sont pas à proprement parler des œuvres personnelles, mais des arrangements d'œuvres d'autres compositeurs. Sa première œuvre reconnue comme chef-d'œuvre est à 21 ans, et il travaillait le genre depuis 10 ans. Il en va dans le même dans le milieu universitaire où l'on constate que 10 ans s'écoule entre leur premier ouvrage et leur meilleur ouvrage.
L'idée des 10 000 heures de pratique, ne tient pas compte de l'efficacité des stratégies, de pratique, ni du rôle d'autres facteurs influents telles que les opportunités d'apprentissage, l'appétence et les croyances des apprenants. La réussite issue de l'effort et le travail routinier n'explique qu'une petite partie de la variance des performances. « En réalité, un effort à besoin de support informationnel – il faut savoir où, et quand trouver l'importunité –, d'un support logistique – il faut savoir comment utiliser l'effort à bon escient, comment le faire fructifier –, et d'un soutien psychologique – il faut avoir ce qui permet de maintenir le désir quand la route est pénible et se battre contre les croyances limitantes qui vont paver le chemin de la réussite. » (134)
Une expérience montre que si l'on apprend aux enfants à résister à la tentation de goûter à une sucrerie, ils construisent des compétences générales verbales et un raisonnement mathématique plus élevé que les enfants qui ont cédé. En d'autres termes, nous avons plus de chance d'avoir un cerveau mieux développé et un contrôle de nos pulsions plus achevé. « Ce qui est mesuré, c'est en fait la capacité de résister à l'automatisme. » (137) Mais la même expérience effectuée sur un échantillon beaucoup plus large ne montre pas cette relation. Car il est difficile d'extraire un facteur quand il s'agit d'une combinatoire.
Mais l'observation de génies ou de précoce dans l'histoire montre qu'à chaque fois, il y a des raisons éducatives qui prévalent : Mozart avait cumulé 3500 heures de pratique avant six ans. Tiger Wood, où les sœurs Williams ont commencé à s'entraîner très jeunes. Ou Polgar a montré sur ses filles qu'il pouvait en faire des championne d'échecs en les éduquant précocement.
D'autres expériences montrent aussi que des élèves, jugés sur leur attractivité physique ont de meilleurs résultats en présentiel que dans des cours en ligne quand leur attractivité est supérieure. « Le talent » reconnu à une personne a donc des effets multiplicateurs (161). C'est ce qu'on appelle l'effet Pareto : un cinquième des chercheurs publient quatre cinquièmes des articles. De même, un cinquième des professionnels dans un domaine artistique donné reçoivent 80 % de l'ensemble des revenus distribués. Ainsi, de petits écarts de talent peuvent aboutir à d'énormes différences de succès à l'arrivée. « D'une manière générale, la méritocratie devient un dispositif qui vise à transformer des micros différences en macro distinctions entre ceux qui réussissent et ceux qui passent à la trappe. ». (162)
Quand les chercheurs évaluent le niveau de compétence de la musique écrite disponible pour les pianistes à différents moments de l'histoire, ils constatent que les compétences humaines récentes sont supérieures à celle d'autrefois. C'est tout simplement parce que aujourd'hui on pratique beaucoup plus.
« Les transclasses sont des cas singuliers, mais ils ne sont pas des cas d’exception. Ils n'échappent pas à leurs circonstances, mais ils les reconfigurent et les combinent autrement, sous l'effet de circonstances, d'appétences et de dispositifs. Ils impriment un nouveau cours à leur trajectoire singulière, qui s'intègre dans un contexte social et collectif. » (175) « Il n'y a pas de génie solitaire. »
« La théorie de l'estime de soi, qui faisait à l'origine partie d'un mouvement militant radical des années 1960 protestant contre l'oppression, s'est fait pendant les dernières décennies largement cooptée, a été détournée et revendue sous forme de mantra : « croyez en vous-même. » Bientôt, la confiance en soi est devenue la solution fourre-tout à tous nos problèmes, tout ce dont nous avions besoin était simplement un changement de perspective pour briser les barrières à l'école, au bureau, et dans la société en général. » (191)
Commentaires
Enregistrer un commentaire